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Commencez par contemplez la belle représentation du Mystère de la Résurrection ci-contre avant d’en lire le commentaire spirituel ci-dessous réalisé par l’équipe de Prions en Eglise.

 

L’évolution de la représentation de la force de Dieu dans l’art

Le thème de cette œuvre est éminemment pascal ! Classique et pourtant d’une modernité étonnante au cœur du XVe siècle où il fut peint. En effet, pendant des siècles, les plus grands artistes ont représenté le Christ Victorieux de la mort sur la coupole des églises, en mosaïque ou en fresque. Tenant toujours à la main le livre de vie, il écrasait les fidèles de sa stature imposante et bénissait les foules d’une main large, comme plusieurs hommes.

Quand la théologie inspire la main de l’artiste

À première vue, Giovanni Bellini peint lui aussi un Christ Pantocrator (« Tout-Puissant ») arborant une coûteuse tunique rehaussée d’un beau ruban brodé d’or, un livre somptueusement relié dans la main gauche. Il bénit de sa droite le spectateur qui passe ou le contemple. Pourtant, si l’attitude est la même que dans les représentations anciennes, le sens que donne le peintre vénitien à la scène est bien différent. Des arbres, un château, des silhouettes qui se pressent, ce beau paysage semble indifférent à l’extraordinaire événement qui vient de se dérouler. Et surtout, Bellini renonce au héros pour peindre le Dieu fragile.

La jeunesse de Dieu face à la mort de la mort

Le Christ est un tout jeune homme, presque un bel adolescent, à la douce chevelure et à la barbe juvénile. Il n’a plus le regard triomphant de juge inflexible ou du champion divin des fresques antiques, mais il a les yeux cernés, un peu hagard, un peu absent, comme s’il était encore en train de contempler l’effroyable spectacle de la mort qu’il vient pourtant de vaincre. Les traits sont tirés. Il a conservé sa couronne d’épines et les rayons lumineux de son nimbe se font bien discrets. La main qui bénit a perdu de sa fermeté et se replie comme une bête blessée autour de sa blessure, au bord du stigmate qui fait un affreux trou rouge dans la chair blanche.

La plaie aux côtés, qu’une fente de sa chemise immaculée laisse apercevoir, colore, elle aussi d’un vermillon fort sinistre, la toile.

Le regard désarmé d’un Dieu qui sauve et qui pardonne

Et pourtant, quelle intensité sur ce visage qui s’expose aux regards de qui voudra le contempler désormais. De celui ou de celle qui ne détournera pas le regard qui s’offre pour quérir l’échange, la rencontre, la relation… Dans ce regard-là il y a de l’amour, de la tendresse, de la pudeur, de la clémence, de la bonté et quelle douceur dans ses lèvres, que la fatigue laisse entrouvertes, comme si Jésus avait encore le souffle court après l’âpre lutte. Le génie du peintre expose combien dans le douloureux combat contre la mort, la force se déploie dans la faiblesse. L’apôtre Paul, le bretteur de Dieu l’affirmera dans ses lettres. C’est cela que peint Bellini : parvenu à l’extrême de la souffrance, de la lassitude, le Christ qui a tout vu et tout pardonné trouve encore la force de lever la main pour bénir, avec une infinie tendresse. Saurons-nous l’accueillir ?

Pères Venceslas Deblock et Sébastien Antoni, 

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